Quel avenir pour les boisés du métro Assomption ?

Au fil des prochaines années, les habitués de la station de métro Assomption seront sans doute témoins de grandes transformations. En effet, le secteur appelé « Assomption Nord » (quadrilatère Viau, Hochelaga, Dickson et Sherbrooke Est) est appelé à se densifier et à se dynamiser, conformément à un projet de Plan particulier d’urbanisme (PPU).

Crédit photo : Charles Bergeron

Selon toute vraisemblance, la réalisation de ce plan implique la destruction, à plus ou moins court terme, de deux boisés bien connus des résidents et des passants : celui qui se situe à proximité du restaurant Beni Hana sur Sherbrooke Est, et celui qui est bordé au nord par la rue de Marseille. Au terme de consultations publiques au cours desquelles des citoyens ont pu exprimer leur attachement à ces milieux naturels, l’OCPM a recommandé la conservation d’au moins quelques arbres et bosquets. Cependant, le promoteur n’aurait pas nécessairement à se plier à cette suggestion.

Ces deux boisés jouent plusieurs rôles importants autant à l’échelle locale que régionale :

  • Rares îlots de fraîcheur
    D’abord et avant tout, les boisés Beni Hana et de Marseille constituent de formidables climatiseurs! Les arbres formant la canopée interceptent et réfléchissent les radiations solaires; de plus, tous les végétaux constituant ces boisés dégagent de la vapeur d’eau par le processus de l’évapotranspiration. Le résultat d’ensemble apparaît clairement sur la carte des îlots de chaleur ci-dessous. Malheureusement, ces boisés n’étant pas aménagés, les résidents ne peuvent pas profiter pleinement de cette fraîcheur si rare cet été… et encore plus rare dans l’Est de Montréal.


Source : Géoportail de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ). Consulté le 14 août 2018.

  • Potentiel inexploité
    Les deux boisés en question sont comme des marqueurs sur le paysage (voir carte ci-dessous) du tracé de l’ancien ruisseau de la Grande Prairie (aussi appelé ruisseau Molson). Que l’on soit pour ou contre le projet de résurgence du cours d’eau, force est d’admettre qu’il y a ici un potentiel paysager et patrimonial qu’il serait très intéressant d’exploiter. De manière contrastante et désolante, on observe que certains citoyens ou commerces se servent aujourd’hui de ces denses boisés comme de dépotoirs clandestins.


Sources : Portail de données ouvertes de Montréal (milieux naturels) et François Plourde (tracé de l’ancien ruisseau de la Grande Prairie).

  • Corridor de biodiversité
    On se trouve ici en présence d’une végétation typique des friches arborescentes urbaines (peuplier, orme, robinier, etc.) et de quelques espèces envahissantes (nerprun, vigne des rivages, etc.). Pour certains, il n’en faut pas plus pour conclure à la pauvreté de ces boisés. Pourtant, la prise en compte des connexions écologiques à plus grande échelle ouvre sur une autre perspective. Il apparaît, d’une part, que les deux boisés étendent le domaine vital de certaines espèces, comme celui du renard, qui y est régulièrement observé. D’autre part, comme le montre la carte précédente, les boisés Beni Hana et de Marseille font le lien entre les milieux naturels plus au sud (friches et milieux humides de l’Assomption Sud) et ceux plus au nord (boisés, friches et milieux humides du parc Maisonneuve, du Bois-des-Pères, du parc Francesca-Cabrini et du parc Boisé-Jean-Milot).

Il ressort de ces quelques observations que les secteurs Assomption Nord et Sud sont liés par l’ancien ruisseau et par un chapelet de milieux naturels. Les deux secteurs forment un tout indissociable, tant au plan écologique qu’au regard du paysage et du patrimoine.
La Ville et l’arrondissement Mercier–Hochelaga-Maisonneuve ont récemment dévoilé les premiers jalons de leur vision de développement pour le secteur Assomption Sud, rebaptisé « écoparc industriel de la Grande Prairie » en l’honneur du cours d’eau disparu. Cette vision se veut innovante, exemplaire et en adéquation avec les principes du développement durable. Dans cette perspective, n’est-il pas légitime de se questionner sur le sort que l’on réserve aux deux boisés de l’Assomption Nord?